Les samplers de Baltimore, 3ème épisode
qui a été à l'origine de cette petite série d'articles sur les samplers de Baltimore
a été brodé en 1831,
une trentaine d’années avant la guerre de sécession.
A la frontière entre le nord industriel et le sud agricole,
Baltimore attirait déjà de nombreux esclaves affranchis.
Un sixième de la population était noire, des esclaves affranchis du sud,
mais aussi de nombreux caribéens.
Car c’est à Baltimore que vont s’installer aussi de nombreux catholiques francophones,
fuyant la révolution française pour certains,
mais venant le plus souvent des Caraïbes, de Saint Domingue (Haïti)
pour échapper à la révolte menée par Toussaint l’Ouverture.
C'est dans ce contexte que Mary Pets a brodé son sampler.
Et elle nous précise même qu'elle l'a brodé
à l’école des Sœurs Oblates de la Providence
"Worked at the Oblates school"
Cette précision nous permet de savoir que Mary Pets
était noire,
sans doute catholique,
et qu’elle savait parler français.
Ce sont deux réfugiées de Saint Domingue, Elizabeth Clarisse Lange et Marie Balas,
qui vont être chargées d’ouvrir la première école catholique pour enfants de couleur
(mais il existait déjà des écoles protestantes de ce type).
A l’école des sœurs de la Providence
on recevait une instruction religieuse bien sûr,
on y apprenait l’anglais et le français
car n’oublions pas que la population francophone était importante dans la ville,
l'arithmetique, l'histoire, la géographie, la musique ....
Photo postérieure à 1906 comme en témoigne le changement de costume des soeurs
On y apprenait aussi l’entretien du linge ainsi que la couture et la broderie :
tout ce qui pouvait permettre aux filles
de tenir correctement leur maison plus tard,
ou de trouver un emploi de femme de chambre par exemple.
Les travaux d’aiguille étaient essentiels
car ils étaient une source de revenus importante pour l’école,
on y brodait notamment de nombreux vêtements liturgiques.
Si le clergé était leur principal client,
les soeurs brodaient aussi pour la population riche de la ville,
il convenait donc de suivre le goût de l’époque.
Alors les samplers des élèves des Oblates sont en tout point identiques
à tous ceux brodés à Baltimore à ce moment là, c’est-à-dire …..
la fameuse maison, son parc, sa grille et son portail dont nous avons déjà parlé.
Petit à petit la mode des samplers à grande maison va évoluer,
la laine va remplacer la soie ....
... et les élèves des Oblates se mettront aussi à broder les motifs de Berlin
quand ces derniers vont envahir les toiles des brodeuses.
Vous pouvez trouver la grille chez the Essamplaire.
Pour vous raconter les samplers de Baltimore,
j’ai été aidée par Gloria Seaman dans la revue SANQ,
par Betty Ring dans son ouvrage Girlhood Embroidery
et par Mary Jaene Edmonds dans son livre Samplers & Samplermakers.
Un dernier sampler de Baltimore
pas fait chez les soeurs de la Providence celui là
bien qu'il ait un air de famille avec celui de Mary Greenfield.
Mais je voulais vous le montrer car il témoigne du petit parfum de France
qui soufflait à Baltimore à l'époque
puisqu'il est intitulé "Vue d'une cascade à Paris"
Bon week end à toutes et à tous.